Je présente ici un texte d'une période où je m'essayais à un blog littéraire supprimé déjà depuis longtemps. J'ai refais quelques petits détails: j'imaginais un prix basé sur le début des années 2000 qui pouvait atteindre les 10 € en 2050; en fait il l'a atteint il y a quelques années déjà. Bref j'en pisse de publier ce texte où je rehausse le prix à 30 € pour 2050 car si ce que je publie se réalise autant ça craint bien...
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La nuit est là, minuit dix, je quitte le boulevard et m'enfonce dans les ruelles sombres et mal éclairées de ce putain de quartier craignos. Ruelles crades, jonchées de merdes de chiens et de pisse d'ivrognes, odeur subtilement repoussante, voilà bien vingt ans que la police n'ose même plus y passer dans ce coupe-gorge maudit. Malgré l'été il fait un peu frais, trop frais pour une nuit d'été, je ferme ma veste et me dis que j'aurais dû sortir avec un pull en plus.
Je tourne le coin habituel, celui que je tourne toutes les fois que je peux, à cinq mètres deux motards discutent en flamand ou en allemand. J'arrive à leur hauteur et tchac, voilà qu'il y en a un qui m'attrape par le col me secoue, sort de son blouson de cuir une chaîne et me murmure à l'oreille, l'haleine puant l'alcool, "fait surtout pas l'malin et refile moi ton fric". Je n'ai rien à faire en fait car le second vient directement prendre mon portefeuille dans ma poche et les 30 euros qu'il y avait dedans. Puis le gars me jette à terre et me lance "allez dégage".
Je savais que ça arriverait un jour, bref je continue mon chemin et m'enfonce encore plus loin dans les ruelles, heureux d'avoir gardé cinquante autres euros cachés dans mes baskets. Après cinq minutes de marche j'aperçois au loin, à dix mètre, les deux dealers que je vais voir pour ma putain de drogue. J'arrive, ils n'ont même pas vingt-cinq ans moi j'en ai quarante et je suis accueilli d'un "salut gamin, alors t'as du flouze aujourd'hui?". Tarif habituel c'est 30 euros pour 30 grammes plus 2 euros pour le paquet de cent feuilles à rouler. Je sors mes cinquante euros. "Désolé mec mais on a pas de monnaie, on te file dix paquets de feuilles, comme ça ça fait de bons comptes. Les bons comptes font les bons amis pas vrai mec?". Mieux vaut pas réclamer vu la carrure de l'un des deux et surtout le couteau que je sais qu'il a toujours sur lui.
Je prends enfonce dans la poche de ma veste le précieux colis et m'en vais salué d'un "tu f'rais mieux d'faire du sport gamin c'est meilleur pour la santé".
Chemin du retour, mieux vaut ne pas recroiser les deux motards, je serai obligé de prendre l'avenue Isabelle Durant, du nom de l’arriviste qui dirigeait le parti écolo par où est venu la prohibition de "cette drogue dangereuse". Un comble pour moi.
Là il fait plus clair, les voitures de police y passent de temps à autres, tout le long de l'avenue des coffee shops mais je sais qu'on me connaît et qu'on ne m'y laissera jamais entrer avec ma grosse drogue. Ici c'est cannabis only. Plus loin le "Central", le nouveau shoot shop: ici cocaïne et héroïne, voire même LSD ou XTC, mais là encore on va vite me repérer.
Enfin la Place et plus loin le boulevard où j'habite. Une fois rentré chez moi je pourrai, rideaux fermés, apprécier cette putain de drogue qui m'a coûté 30 euros pour à peine de quoi tenir un jour, ce tabac de derrière les fagots!
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Qu'ajouter d'autre sinon que le jour où les USA seront le principal et plus gros producteur de Cannabis, ça passera de mode ça aussi...